Ma réaction : les informations sur les évolutions TICE de l'enseignement supérieur percolent encore goutte à goutte vers le public des lecteurs du Monde ... c'est un peu lent, me semble-t-il !
L'article
du Monde reste très timide par rapport à celui du Time de ce jour : c'est une indication sur la faible
percée du sujet TICE chez les leaders d'opinion, les dirigeants et les
décideurs en France
© Le Monde
Paru dans Le Monde du jeudi 11 octobre 2012 (page 13)
Par Nathalie Brafman
"L'enseignant qui délivre la parole sacrée à des étudiants passifs, cela ne marche plus. Dans sa forme actuelle, l'amphi disparaîtra sans doute mais ne le frappons pas d'anathème !", lance Fabrice Chemla, vice-président formation initiale et continue à l'université Pierre-et-Marie-Curie, UPMC.
Dans son université, les cours de physique ressemblent à des jeux de quiz. Munis de petits boîtiers, les étudiants doivent régulièrement répondre à des questions de leur professeur. Vidéo "Je trouvais mes étudiants passifs. Je les voyais recopier mes cours et je me demandais quoi faire pour les réveiller", se souvient Brahim Lamine, professeur de physique à l'UMPC et à l'origine de cette innovation.
Une fois qu'ils ont répondu, l'enseignant dispose de l'histogramme des réponses. Puis chacun discute, argumente, explique sa solution. Et ça marche.
"Immédiatement, les étudiants sont plus actifs. Le professeur sait où ils en sont de la compréhension de son cours. Il ne le déroule plus comme avant et il peut adapter sa progression en temps réel en fonction de leurs difficultés", affirme Brahim Lamine.
Depuis quasiment 30 ans, de nombreuses études ont démontré que le cours magistral traditionnel n'est pas toujours efficace pour assimiler des connaissances. Aujourd'hui, l'université n'a plus le choix. Elle doit s'adapter aux "digital natives", cette génération née avec Internet, qu'ils soient étudiants ou même enseignants.
"Si jusqu'à présent l'éducation n'avait pas été touchée de plein fouet par la révolution numérique, c'est en train d'arriver, assure Claude Kirchner, délégué général à la recherche à l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria). Les enseignants doivent prendre en compte le fait que les étudiants ont accès à la connaissance grâce à la technologie. Cela ne signifie pas qu'il n'y aura plus de cours physique mais qu'ils seront différents."
Les enseignants sont-ils là pour enseigner un contenu aux étudiants ou plutôt pour leur apprendre à apprendre ? Cette question s'est invitée lors des auditions des Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche.
"Cela va bien au-delà de ce que peuvent apporter les outils numériques, note Vincent Berger, rapporteur général du comité de pilotage (voir la note de synthèse pages 6/7 sur 18). C'est toute la relation entre l'individu et le savoir qui est bouleversée dans la génération qui s'annonce à l'université, chez les étudiants comme chez les enseignants."
Contribution à ces Assises de Gilbert Touzot, président de l'Université Numérique Ingénierie et Technologie (UNIT) - fréquemment évoquée dans ce blog, car je fais partie de ses fans - : Le numérique dans l’enseignement supérieur : un défi et une opportunité à fort potentiel sociétal et économique…
Contribution de Nicolas Brucker (MCF Littérature française, Université de Lorraine) : Pédagogie et numérique
A l'université de Cergy-Pontoise, les amphis de 400 places ont disparu depuis des années. Dans les disciplines scientifiques, il n'y a plus de cours en amphi au premier semestre. "
Tout se fait en travaux dirigés avec des petits groupes de trente étudiants", indique son président François Germinet.
Révolution lente
Davantage de relation humaine, de tutorat, de travaux pratiques... Sans doute est-ce la clé pour enrayer l'échec dans les premières années de licence ? Depuis les années 1990, l'UNEF, le principal syndicat étudiant, dénonce cette pratique mandarinale qui met la discipline avant l'étudiant.
"Il y a une sorte de totémisation de la discipline. Le cours en amphi a un effet dévastateur en première année. Peut-être adapté dans le cadre d'une université qui comptait 300 000 étudiants, il ne l'est pas pour 1,6 million, souligne Emmanuel Zemmour, son président. Or ce sont dans les parcours les plus sélectifs - classes prépa, IUT, grandes écoles - que les étudiants sont le mieux encadrés."Les universités ont conscience que l'enseignement traditionnel n'est plus adapté. La révolution numérique est en marche. Il ne s'agit pas de multiplier les cours en ligne mais de modifier la manière d'enseigner.
Pour François Germinet : "Lorsqu'on aura développé des outils de ressources électroniques afin que les étudiants puissent travailler les cours avant de venir, alors on pourra supprimer les amphis." Ce n'est pas pour demain.
Nathalie Brafman
Ces innovations venues d'ailleurs
L'UNIVERSITÉ danoise d'Aalborg a été créée en 1974 pour promouvoir le " problem based learning ",
l'apprentissage par problème. Le traditionnel cours magistral n'y a
plus cours. Pendant environ deux mois, les étudiants suivent des cours
magistraux, font des exercices à plusieurs, puis se réunissent en
groupes de projets et choisissent, eux-mêmes, une problématique
scientifique. Ils n'ont alors plus de cours mais sont obligés de venir à
l'université tous les jours pour travailler sur leur sujet. Évidemment,
un professeur est là pour les aider.
Les résultats sont probants. Grâce à ce travail en équipe,
une infime partie des étudiants arrête ses études en cours de cursus et
le taux d'échec est réduit.
Petit à petit, de grands établissements plus traditionnels
revoient aussi leur modèle. La très prestigieuse université de Stanford,
en Californie, dont le président, John L. Hennessy, a même prédit " la mort des salles de classe ",
a décidé de dématérialiser ses enseignements. En 2011, deux
professeurs, Sebastian Thrun et Peter Norvig, ont ouvert leur cours d'introduction à l'intelligence artificielle à des étudiants du monde
entier. Le succès a été immédiat : 160 000 élèves se sont inscrits. Et
des quelque 250 étudiants qui ont été reçus à l'examen avec la note
maximale de 100 %, pas un n'était de Stanford !
Clips pédagogiques
Encore plus surprenant : les étudiants présents physiquement
dans l'amphithéâtre n'étaient plus qu'une trentaine, contre 300
auparavant. "
Évidemment, il ne s'agit pas de filmer bêtement les cours des professeurs. Il faut y ajouter des animations, des graphiques, estime Paul Seabright, professeur d'économie, spécialiste en économie des organisations à l’École d'économie de Toulouse, sinon les étudiants risquent de se lasser rapidement ! "
C'est exactement ce qu'ont fait deux professeurs de
l'université George Mason (Washington), Tyler Cowen et Alex Tabarrok,
avec Marginal Revolution University.
" Des clips de sept minutes où l'on absorbe autant de matière que pendant un cours magistral d'une heure et demie, affirme Paul Seabright. Il y a aussi Ted Talks, une ONG qui finance des conférences de 15 à 20 minutes d'experts du monde entier sur une grande variété de sujets. "
La prédiction de John L. Hennessy se réalisera-t-elle ? Deux
anciens de Stanford sont à l'origine de Coursera, une start-up qui
propose des MOOC - massive open online courses ou " cours en
ligne multi-apprenants ". Créée en avril 2012, Coursera a levé 16
millions de dollars (12,4 millions d'euros) et a déjà signé avec une
trentaine d'universités. Plus d'un million d'étudiants dans près de 200
pays ont suivi au moins un des 220 cours proposés.
N. Bn
© Le Monde
Le sujet MOOC est le sujet à suivre de la rentrée 2012 :
Le premier Massive Open Online Course francophone a ouvert le 4 octobre. Le cours s’intitule ITYPA (acronyme de « Internet, tout y est pour apprendre »).
Ce cours explore la façon dont on peut apprendre avec internet. Il
permettra aux participants de construire une stratégie qui leur est
propre pour tirer profit des possibilités d'apprentissage offertes par
le net. Nous verrons différentes techniques utiles pour se créer un «
environnement
personnel d'apprentissage » en ligne et réfléchirons à la dimension sociale de l'apprentissage.
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